On n'est jamais seul le soir...

On n’est jamais seul le soir…



Les trois hommes s’en vont en riant. Il est maintenant seul, enchaîné. Ils ont fait de son corps un océan de douleur. Une douleur presque insupportable. Lui-même ne sait pas comment il fait pour ne pas pleure, pour ne pas hurler. Et pourtant il en a envie. De pleurer. De crier aussi. De crier sa haine, son tourment. De crier son désespoir, sa douleur. Mais il ne le fait pas. Il tente de ne pas céder. Et puis ça ne ferait qu’accroître sa douleur. Il a déjà trop mal. Il veut s’évanouir, oublier, ne plus subir cette souffrance. Mais il ne peut pas. La douleur est trop puissante pour qu’il perde conscience. Peut-être que ça vient de son sang qui coule à flots devant ses yeux. Peut-être que ça vient de ce qu’il reste de son nez. Peut-être aussi que ça vient de ses côtes cassées, du moignon là où il y avait le jour précédant sa main gauche. Peut-être même que c’était tout cela réuni. Peut-être la peur de mourir l’empêche-t-elle de s’évanouir, de peur qu’il ne se réveille pas. Il ne veut pas mourir. Il veut vivre. Il veut se venger. Il veut de nouveau se sentir fort, de nouveau sentir la vie en lui. Une vague de douleur submerge son corps et il laisse échapper un râle : il y a encore de la vie en lui. Un peu trop même. Il a très mal. Il veut que ça s’arrête.
C’était une affaire comme une autre. Il était à la tête d’un des plus vastes réseaux d’espions de l’Empire. On avait sollicité son aide, par divers contacts. Un voleur renommé qui visait les bijoux d’un aristocrate d’Altdorf. Il lui avait fourni les plans moyennant une importante finance. Rien qui ne lui était déjà arrivé. Jusqu’à ce que la garde vienne et l’arrête.
Et il est là, enchaîné. Et il a mal. Et il se dit qu’il ne passera pas la nuit. Mais il veut vivre. Alors il se concentre sur autre chose. Le sang sèche devant ses yeux et il n’y voit pas grand-chose. Il écoute. Il n’entend rien, seul le silence répond à sa détresse. Il doit être tard. Il a perdu la notion du temps. Et il entend un bruit. Un frottement. Puis plus rien. Il croit avoir rêvé. Puis le même frottement. Il ouvre les yeux et à travers le voile rouge de son sang séché, il voit une forme. Plus petite qu’un adulte, plus grande qu’un enfant. Plus courbé qu’un vieillard, aussi rapide qu’un elfe. Il ne sait pas ce qu’elle peut être. Il ne voit pas assez bien pour la décrire. Il lui semble voir des griffes. Elle parle. Elle lui parle.
« Mon maître-maître vous juge utile, chose-homme. L’heure de mourir n’est pas encore-encore arrivée. »
Il aimerait soupirer de joie mais il a trop mal. D’autres formes semblables arrivent. Il les sent près de lui. Elles le détachent !
« Laisse-toi faire, chose-homme, il entend. »
Il se laisse faire. Il se laisse aller. Un « clic », ses chaînes tombent. Il les suit. Il plonge dans le noir. Il a mal. Mais il est en vie !

Un début plus que prometteur, vivement la suite ! Bonne description, c'est nickel !

Pas mal en effet!
Le truc qui me démange de voir la suite est le clan d'appartenance des skavens (voir si l'humain va fibnir en rats-ogre ou en rats-mécaniques ...)

Valk continue!

C'est le genre de texte que j'aime: court et intense , on veut la suite!

Gromuel , Moulder? Moulder!

Partie II :

Il descend. L’obscurité est repoussée par la lueur de sa torche reflétée sur les parois de pierre noire. Il descend. Il perd le compte des marches irrégulières et abîmées, comme si elles avaient été trop souvent utilisées. Il descend. Il ne désespère plus d’atteindre enfin les dernières marches. Il a l’habitude désormais. Enfin, il atteint le bout de l’escalier. La faible lueur de sa torche qui n’éclaire guère que son visage n’est plus seule. D’autres, de lointaines et de plus proches se joignent à sa lumière. Comme si elles étaient reliées par un lien unissant entre elles toutes les torches. Il voit convenablement, mais il n’en a pas vraiment besoin. Il connaît la salle par cœur. La torche est selon lui une précaution inutile. Mais il se plie à la règle. Comme toujours. Il est l’un des plus anciens du chœur, il s’est fait aux lois.
La salle est grande et ils ne sont pas très nombreux. Suffisamment cependant pour chanter la gloire des Vrais Dieux. Pas assez pour trop attirer l’attention de la milice. Il se place au centre du pentacle dessiné sur le sol. C’est toujours ainsi. Quand les membres du chœur arrivent, tout est préparé. Les deux pentacles sont tracés. Le premier est fait de telle sorte que douze acolytes peuvent s’y placer. Toujours de la même manière. L’autre est plus petit et au centre est déposée une lettre. C’est le rituel. Il y est inscrit le nom de celui qui mènera le chœur ce soir, de celui qui célèbrera la rondeur de Morrslieb, de celui que les Vrais Dieux favoriseront jusqu’à la prochaine pleine lune.
Ils attendent autour du pentacle. Chaque acolyte a le visage masqué par une robe noire à capuche. Un homme apparaît. Le Maître. L’Elu. Il est le seul à visage découvert. Au milieu de son front pâle se tient une corne courbe, incarnation de la faveur des Vrais Dieux. Il prend la lettre, la parcourt des yeux. Il le désigne. Lui, l’un des plus anciens du chœur. Pour la première fois, il va être le Coryphée, le meneur. Les autres prennent place et lui, il rejoint le second pentacle.
Il entame le chant solennel. Il le connaît parfaitement. Aucune syllabe, aucune virgule ne lui est étrangère. Il sent son cœur s’emplir d’allégresse, de la puissance des Vrais Dieux au fur et à mesure que les autres répète ses phrases. Le chant atteint le paroxysme de sa puissance quand il est interrompu par un bruit métallique. Cela n’était jamais arrivé. Il ne sait comment réagir. Il scrute la salle, éclairée par les torches des acolytes. Il se rend alors compte que le Maître s’est retiré. Il voit aussi la source du bruit : la milice.
Comme un seul homme, le chœur s’éparpille dans toutes les directions. Les miliciens entrent en force et en interceptent beaucoup. Il jure à voix basse. Pour la première fois, il est le Coryphée et ce soir même, les Vrais Dieux décident de mettre fin au chœur qui leur rend hommage. Il court aussi, mais pas dans la même direction que les autres. Vers le passage.
Mais quel passage ? Il ne connaît pas de passage. Pourtant il sait qu’il existe un passage. Il ne se pose pas de question, il court et appuie sur une pierre. Alors qu’il sort de la pièce, deux miliciens le suivent et l’attrapent. Ils l’insultent, le frappent. Il a mal mais sa Foi est plus forte. Les Vrais Dieux lui apporteront de l’aide. On le frappe bas-ventre. Il tombe à terre et les deux miliciens le rouent de coups. Sa Foi est un peu ébranlée. Dans une supplique silencieuse, il prie n’importe quel Dieu de le sauver. Mais personne ne semble l’aider. Le passage est refermé, il ne voit pas ce qui se passe de l’autre côté. De toute façon, il fait trop sombre. Il n’a plus de torche avec lui et les miliciens non plus.
Ils continuent de le frapper, il continue de gémir en implorant. Il doit les dégoûter par sa faiblesse. Il s’en moque. Il ne veut pas mourir. Soudain, les coups s’arrêtent. Il sent les deux hommes qui vacillent. L’un tombe en arrière, l’autre sur lui. Il a la respiration coupée. Soudain, il sent le corps se soulever. Quelqu’un le soulève !
En face de lui, se tient une créature de petite taille et poilue, à la gueule de rat. Il distingue plusieurs autres formes semblables. Il se sent relevé et poussé vers l’avant, dans un escalier qui descend. Celui-là, il ne le connaît pas. On l’emmène dans un lieu inconnu de tous. Les Vrais Dieux l’ont sauvé, finalement. Il est en sécurité. Du moins, il l’espère…

Bonne suite à la hauteur de ce qu'on attendait !